Allumer le feu
Dans la cabane rénovée de Plan-Bas, il suffira de craquer une allumette pour se réchauffer. Le trèfle, ce petit poêle emblématique de notre région, a été remis en service.
Cet objet a été à l’origine d’une véritable révolution domestique.
Dès le 19ème siècle sa diffusion s’accélère dans tous les villages de Haute Provence, son usage courant perdurera pendant près de deux siècles.
Avant d’enfermer le feu dans ce petit meuble de fonte, inventé et fabriqué dans les fonderies de Franche Comté, les maisons n’avaient que des cheminées ouvertes, grandes consommatrices de bois pour une chaleur limitée. L’âtre était très sommaire, une dalle de pierre au sol et une autre au mur, très rarement une plaque en fonte, ou un potager dans un coin. Une seule pièce disposait de cheminée. On pouvait quelques fois gagner un peu de chaleur pour une autre pièce mitoyenne, notamment par des placards muraux.
Pour installer le nouveau poêle il fallait aménager un conduit de fumée en tuyaux, savamment calculé, et pas toujours avec le fil à plomb (ce qui n’a pas arrangé le Père Noël). Chacun a dû faire preuve d’inventivité pour rejoindre sa sortie sur le toit.
Ce petit fourneau a changé la façon de cuisiner.
On l’a vite dénommé trèfle puisqu’il disposait de trous pour marmites, disposés par trois en feuilles de trèfle pour le modèle courant, et même quatre trous pour le plus luxueux. Ce qui lui donnait toujours une forme évasée à l’avant, particulièrement pratique et légère.
Pour la ménagère, terminé la cuisine au sol, accroupie devant la cheminée, avec la lourde marmite pendue à la crémaillère ou posée sur pieds. On pouvait désormais mijoter à feu doux. La poêle à frire à long manche, pour la cheminée ouverte, est devenue objet de décoration.
Le petit fourneau est très ingénieux : un four sur le côté, ou même une bouilloire sur certains modèles. Le tirage peut être modulé par une petite trappe, ou même une clé supplémentaire installée sur le tuyau d’évacuation des fumées. Les cendres tombent dans un tiroir. Un plateau à l’avant évite les escarbilles sur le plancher…
Il dure des siècles, à condition de prendre soin de ne pas casser les couvercles, devenus des pièces rares.
On le commandait à la foire d’automne, ou chez le ferblantier : voici les quatre numéros du modèle Provence avec « le grand trou derrière », une nouvelle série en n°5, plus cossue complètera l'offre.
Quelques médecins vers 1850 avaient craint des émanations du métal des fourneaux, et la chaleur sèche et excessive des pièces de vie, mais cela n’a pas affecté le succès extraordinaire de ces appareils. Voilà donc un objet emblématique et incontournable de nos montagnes, qui rejoint marmites, charrettes et autres objets du passé transformés en jardinières...