Chanson de noces valéiane

Dans notre anthologie, L’écrit d’oc en Ubaye (Éd. La Sabença, 2020),  Philippe Martel et moi avons repris le peu que nous avons collecté sur la chanson dans la Vallée, précisant qu’il « est difficile de dire chansons typiquement valéianes tant sont évidents les apports extérieurs de la chanson populaire en particulier ».

Mais nous avions renoncé à placer dans notre ouvrage la chanson Li noço rapportée par Julien Coste dans son ouvrage de 1932, Vallis montium (Histoire de Barcelonnette et de la vallée de l’Ubaye). « Il est bien difficile de trouver des chansons d’alors, elles semblent ne s’être pas transmises… », déplorait-il déjà à l’époque. La provenance du texte Li noço n’est pas indiquée et J. Coste précisait que cette chanson « est en patois pour donner un exemple du dialecte des Vésubiens ». C’est effectivement un patois au sens propre avec une graphie « à la diable », sur une base  provençale approximative.

Aucune partition ne figurant dans le livre, j’entrepris d’en bâtir une suffisamment rythmée pour la danse... Et, pour la chanter plus facilement, j’eus recours à la graphie de François Arnaud (1834-1908)  en procédant à quelques aménagements de détail du texte,  le titre devenant Las noças.

Le texte suit ci-après avec ma traduction : le refrain n’est noté qu’une fois, mais peut se répéter après chaque couplet.

L’Estrucàire de l’Adrèch
15 octobre 2024

Las noças                                      

Julien Coste (collectage de ) in Vallis montium   ( 1932)

I
Aquésta fès n’es pas pèr rìre,
Nouéstre Moussù m’ou a dich.
Èira pouèiou vous ou dìre
Nous a toutes avertì.
Nous a dich: tenè vous bèn prèsts (mous enfàns !)
Sùbre-tout saguè ben lèsts tout’(èn dansànt !).

II
Oourì moun bèou chapèou de pàlha,
Mous esclòs tant bèn tachàs
Oourì ma poulìa bràlha
Que ma màire m’a (z) adoubà
Oourì la fàça bèn néta (sarì bèou !),
Me faràn de frisoulettas (fouérça bèn !).

III
Oourì la mouéstra de moun pàire
Emé soun poulit courdoun,
Un bel habìt que me van fàire,
Moun gilét à gràndas flours,
N’oourì pas blàncha chimìsa (fài pas rèn !)
Quand sarié de téla grisa (farè bèn !).

Refrain

La derri doun di, derri, derri, derri !
La derri doun di, doun (la) derri, derra !

IV
Li oourè de fouàssas, de bignétas,
De biscuéchs e de crouquànts,
Tout plèn de càousas bouenétas
Que se mànjoun sènsa fan.
D’aquéou bouén vin soutirà (n’èn beourèn !)
E m’aquélas jouvencèlla(s) (dansarèn !).

V
Vàoutres, sià de camaràdes
Qu’eimà (z) à vous divertìr,
Quand las càous(as) soun arrangeàdas[1]
Sabè toutes apploudìr.
Mè si me fasè ma part gròssa (quand sarì !)
M’entournànt d’aquélas nòças (vous dirì !).

Les noces

I     
Cette fois ce n’est pas pour rire,
Notre Monsieur me l’a dit.
Maintenant je peux vous le dire
Il nous a tous avertis.
Il nous a dit: tenez vous bien prêts (mes enfants !)
Surtout soyez tous bien lestes (en dansant !).

II
J’aurai mon beau chapeau de paille,
Mes sabots très bien cloutés
J’aurai mon beau pantalon
Que ma mère m’a préparé
J’aurai la figure bien propre (je serai beau !),
On me fera des frisettes (très bien !).

III
J’aurai la montre de mon père
Avec son joli cordon,
Un bel habit qu’on va me faire ,
Mon gilet à grandes fleurs,
Je n’aurai pas de chemise blanche (ça ne fait rien !)
Quand elle serait de toile grise (ça ira bien !).

 Refrain

La derri doun di, derri, derri, derri !
La derri doun di, doun (la) derri, derra !

IV
Il y aura des fougasses, des beignets,
Des biscuits et des croquants,
Tout plein de choses bien bonnes
Qui se mangent sans faim.
De ce bon vin qui est tiré (nous en boirons !)
Et avec ces jouvencelles (nous danserons !).

V
Vous autres qui êtes des camarades
Qui aimez à vous divertir,
Quand les choses sont arrangées
Vous savez tous applaudir.
Mais si vous me faites la part belle (quand j’y serai !)
En revenant de ces noces (je vous le dirai !).

[1]      Le mariage étant conclu.