D’Amour et d’eau vive, le grand cerf
Poème de Lise,
lu par Marc Bouriche
Dans la neige fraîche les bruits s'endorment par magie comme les fleurs au printemps et parfois ressortent légèrement froissés lorsque le froid rend le manteau blanc craquant sous l’effort à l’heure où le grand cerf croise à la lisière des bois.
Celui qui m'offrit la rencontre glissait d'un pas de nuage à grandes enjambées épousant le relief comme un oiseau, le soleil dans son dos peinait à suivre sa trace sinueuse et souple et pourtant tout était lumière en sa venue. Tout indiquait que l'air des cimes l'avait si intensément baigné, durant les longs jours d'enfance, qu'il en portait l'indomptable parfum, sceau des hautes terres en lui.
Le ruisseau seul pouvait saluer sa course, chanter l'élan et c'est au bord de ce ruisseau qu'il est venu plonger son regard insouciant de ma présence, un regard qui boit d'un trait comme un long souffle sans précipitation à la manière dont s'abreuvent les bêtes. Puis nos solitudes sont entrées en conversation.
Une musique ronflant au cœur à la manière du feu quand l'air est vif tout autour, des paroles muettes du dire saisies à vol d'oiseau en l'immensité qui les forge et ce qui se consume alors d'une frêle silhouette suspendue au fil de la Joie entre deux sourires.
Nul besoin de qui nous étions, tout chantait la romance du ruisseau entre les pierres, à peine un fil parfois sous la glace, lui qui transporte la cime dans la plaine sans jamais renier sa parole, sans modifier l'allure, en de simples épousailles.
Il venait de lieux que mes pas ne pouvaient plus visiter et où je n'ai pas besoin d'aller puisqu'il vient de le faire à ma place, en m'apportant réchauffé au creux de sa présence, de sa seule force, le pain quotidien du cœur.
Il entend le murmure de l'eau comme je ne sais plus le faire et par le tremblement de ses lèvres lorsqu'il évoque la résonance il le restitue si bien que je n'ai plus besoin de prêter l'oreille.
En même temps nous savons tous deux que tout ce qui peut se vivre du mot aimer est au delà de l'échange, cette part du mystère qui reprit la route avec lui, fine trace sur le chemin que la main de la nuit viendra reprendre.
Dans la fraîcheur du passage, en cette brise tendre enveloppant l'être au monde, Poésie est entrée sous la plume de Christiane Singer :
« Aimer c'est voir l'autre comme Dieu l'a rêvé » .
Lise
Photos du vallon du Laverq : Lucien
Photo cerfs : Pixabay