Pierre ALLEMAND, un curé qui ne tient pas ses promesses ?
Au mois d’octobre 1638, le décès de Messire Jacques AMAVET laisse la cure du Laverq vacante et les paroissiens sont contraints de recourir à Monseigneur l’Archevêque d’Embrun.
Le 3 novembre Messire Pierre ALLEMAND prêtre de St Barthélémy, paroisse de Méolans, promet d’assurer le service de cette cure tant que son supérieur lui en fera commande. Les paroissiens promettent de payer 6 écus par an à Pierre ALLEMAND pour effectuer ce service à condition également qu’il fasse l’inventaire des meubles et joyaux appartenant à l’église. Ils sont obligés de lui faire une maison avec grenier dans la qualité du lieu.
Mais cette promesse a-t-elle été tenue ? Il semble que non car le 17 juillet 1639, Esprit HERMELIN et Louis REYNAUD, les procureurs de l’église de St Antoine du Laverc font acte devant le notaire que lors d’une rencontre fortuite avec Messire Pierre ALLEMAND, ils lui ont aimablement fait remarquer que suite à leur promesse ils ont travaillé de tout leur possible à faire une maison claustrale et le somme de vouloir y résider conformément à son obligation et de se départir du service qu’il fait à la chapelle de St Barthélémy pour plus commodément pouvoir vaquer à l’administration des St Sacrements pour prévenir tout inconvénient pouvant survenir à cause de son absence. Il l’interpelle aussi de vouloir déclarer s’il désire occuper cette cure ou autrement leur permettre de se pourvoir ailleurs. Pierre ALLEMAND demande un délai pour leur donner une réponse.
Un peu de géographie pour comprendre.
Méolans est un village situé dans la vallée de l’Ubaye à environ 15 km de Barcelonnette. Le Laverq et St Barthélémy sont des hameaux de Méolans disposant chacun de leur église et bien sûr d’un prêtre.
Cela se justifie par la distance et l’altitude : Le Laverq est à 10 Km du village de Méolans et à 1700 m d’altitude. St Barthélémy est à mi-chemin et à 1250 m. Le vallon est étroit et tout en haut l’hiver y est rude : Près de la petite église, il faut bien attendre 10h le matin pour que le soleil débouche de la Séolane et dès 15h il se cache derrière l’Aupillon.
Pour le prêtre, la cure du Laverq n’est donc pas très attirante.
Quoi qu’il en soit, un an plus tard, le 15 juillet 1640, les paroissiens désignent Louis CLARIOND, Pierre TRON et Julian HERMELIN leurs procureurs spéciaux pour se transporter à Barcelonnette, Embrun et autres lieux que besoin pour se présenter devant Monsieur l’officiel forain de cette vallée ou autrement devant monseigneur l’archevêque d’Embrun et aller présenter les doléances qu’ils ont contre messire Pierre ALLEMAND prêtre leur curé lequel par acte de promesse s’est obligé à résider ordinairement dans l’enclos de ladite cure et n’a daigné le faire jusques à présent sous prétexte du service qu’il fait à la chapelle de St Barthélémy plus la permission qu’il a de célébrer deux messes les jours de fête et dimanche. En conséquence Pierre ALLEMAND se trouve la plus grande partie du temps absent et les habitants, frustrés de l’administration des St sacrements lorsqu’ils en ont besoin, demandent la permission de trouver un prêtre.
Et l’affaire ne s’arrête pas là puisque le 26 mai 1641 à l’Abbaye, devant le grangeage des moines de Boscodon et par devant Louis CLARIOND, Baile ducal, les paroissiens ont constitué comme leurs procureurs Louis CLARIOND et Joseph HERMELIN pour se transporter à la ville d’Embrun et autres lieux si besoin, pour poursuivre un procès qu’ils ont par devant l’Archevêque d’Embrun, contre leur curé Pierre ALLEMAND jusqu’à donner fin et sentence définitive.
Après cette date, on ne trouve plus de référence à ce différent. Pierre ALLEMAND est cité bien des fois sur les actes du notaire en tant que témoin et sur d’autres en tant qu’acheteur de terres au village de Méolans ce qui suppose qu’il a préféré rester dans la basse vallée. Les registres BMS de l’époque ne nous sont pas parvenus, la question restera donc sans réponse.
On apprendra un peu plus tard dans le testament de son frère Jean, le 13 avril 1655, que Pierre ALLEMAND est prêtre et curé des Thuiles, le village voisin.